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loicbarriere
7 octobre 2007

Remise du manuscrit définitif

Remise du manuscrit définitif après une ultime relecture. Traquer les répétitions, les niaiseries, les incohérences. Tenter de se mettre à la place d’un lecteur qui ne saurait rien de cette histoire de réfugiés khmers retournant au pays. Le plus difficile, quand on a travaillé autant, et si longtemps, sur un texte, c’est de ne pas s’habituer à ses propres phrases, c’est-à-dire qu’il faut essayer de les redécouvrir comme si on les lisait pour la première fois. Cette dernière lecture avant la mise en page du livre consiste à imaginer la chose imprimée, entre les mains d’un inconnu : est-ce que ce que veux vraiment que ces mots, ces phrases existent ainsi, et pour toujours ? Je sacralise la page imprimée. Il m’est interdit d’avoir honte de mes écrits dans un an, dans dix ans.

Quand on se relit, à ce stade, il n’y a plus de place pour les doutes et les remords. Il faut assumer. Je relis la chronologie qui figurera à la fin du roman, la préface : suis-je certain de l’orthographe du nom de Khieu Samphan ? Les évènements que je décris ont-ils eu lieu aux dates que je mentionne ? Vérifications de dernière minute, comme ces gens atteint de TOC qui mettent dix fois la clé dans la serrure avant de partir.

La toute-puissance de l’auteur lui permet, au tout dernier moment, de supprimer un mot inutile, retrancher telle phrase qui m’inspirait une satisfaction imbécile, et grâce au prodige du traitement de texte, remplacer tel nom par un autre. Je ne me suis  pas privé, lors de cette dernière relecture, de changer les prénoms de deux protagonistes secondaires. L’ai-je fait pour de mauvaises raisons ? L’un avait un prénom identique au modèle qui m’a inspiré le personnage du frère adoptif de Josué. L’autre, l’épouse vietnamienne de Sambat, risquait d’être confondue avec une personne réelle de mes connaissances, peu connue pour son ouverture d’esprit ou son humour.

            Je me suis demandé aussi, jusqu’au dernier moment, si je devais modifier l’identité du principal protagoniste de mon livre, Rotha. J’ai gardé, à sa demande, son prénom et son nom qui figurent en toutes lettres dans le roman. Sans lui, ce livre n’aurait jamais pu voir le jour. Il est pourtant étrange d’écrire un roman, et non un récit, dont le héros existe vraiment, et de l’impliquer dans des situations qu’il n’a pas vécues tout en gardant son nom véritable. Rotha n’a lu que des extraits des versions antérieures de mon livre et il découvrira ce que j’ai fait de lui lors de la parution du livre en mars 2008. Il a souhaité apparaître dans Le cœur des enfants khmers sous son véritable nom. Le regrettera-t-il ? En sera-t-il fier ? Pour la plupart des lecteurs, j’imagine, cette histoire sera la sienne. Aujourd’hui, six ans après avoir commencé la rédaction de ce roman, j’ai du mal à trier les épisodes inventés et la réalité.

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