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loicbarriere
15 avril 2010

Un article sur "Quelques mots d'arabe"

Mon ami Salim Jay évoque mon roman "Quelques mots d'arabe" (Seuil, 2004) dans le journal marocain, Le Soir Echos

Salim Jay : Quatre écrivains et quelques mots d’arabe

Culture | salimjay | 15 avril 2010 à 7 h 55 min

Peu d’auteurs ont mieux exprimé l’intimité franco-maghrébine  avec ses paradoxes et sa rémanence que Loïc Barrière a su le faire, d’abord avec «Le voyage clandestin»  (Seuil, 1998)  ensuite «Quelques  mots d’arabe». (Seuil, 2004).  On saluera là une sorte  de fraîcheur dans l’inspiration mais aussi une bonne connaissance des sociétés évoquées. En effet, Barrière s’obstine  dans l’empathie et ce que l’amitié  doit à son regard n’entraîne pas la défaite de la lucidité. «Quelque mots d’arabe» raconte l’attachement d’un jeune homme pour le Maghreb, y compris la Mauritanie. Des voyages, donc, et des liens, minutieusement entretenus  et interrogés.

D’abord, il y eut l’enfance  et la découverte du Maghreb  d’en  France. C’est finement conté, sans démagogie racoleuse. Nous faisons la connaissance d’Algériens et d’Algériennes de France, de Marocains du Maroc et de France, de Franco-Maghrébins, de Mauritaniens qui conduisent le narrateur de Nouakchott jusqu’à Nouadhibou. Ce sont des voyages successifs, des alliances, des réminiscences, tout un spectre de relations détaillées généreusement. Les amitiés d’enfance, les apprentissages partagés,  les loyautés comme les ambiguïtés du vivre ensemble. Il y a surtout, dans «Quelques mots d’arabe», l’expression volontariste d’une attention presque obsessionnelle à la détresse sourde d’une jeunesse maghrébine en perte d’espoir quant à l’emploi de sa vie, dans tous les sens de ces termes. Par cette proximité intelligente avec les inquiétudes les plus viscérales d’autrui, le roman de Loïc Barrière accomplit une sorte de tour de force, même si la langue dans laquelle le récit nous est fait manque, un peu, de cette vigueur que le livre, pourtant, possède.

Loïc Barrière a cherché à être compris plutôt qu’à séduire et, finalement, ce qui séduit dans «Quelques  mots d’arabe», c’est une forme de respect pour le lecteur qui n’est pas une qualité si courante. Dans le passionnant «Pasolini» publié par René de Ceccaty dans la collection Folio-Biographie en 2006, le critique citait cette phrase plus que condescendante de Pasolini en 1965 : «La moyenne de l’intelligence des Marocains est basse, je dois le dire : et cela aussi les rapproche de nombreux peuples en voie de développement». Il n’a fallu que quarante ans à Tahar Ben  Jelloun pour faire siennes de telles conclusions dans un roman «Partir» ( Gallimanard, 2006 ) où l’écrivain prétendait décrire les raisons et les causes de l’émigration clandestine, les voies et les moyens de la séduction et de la perdition. Hélas, «Partir» était un patchwork de préjugés rancis, d’aberrations convenues, un exercice de paresse intellectuelle en roue libre.

La surprise vint plutôt de «Les Hommes passent à Tanger»,
roman d’Ari Behn, traduit du norvégien par Céline Romand-Monnier  (Actes Sud 2006). Les  pratiquants du tourisme sexuel, de la vénalité, de la dépravation ou du terrorisme, coloriés fadement par Ben  Jelloun, apparaissent en perpétuel contre-emploi. Au contraire, le roman d’Ari Behn pétille de drôlerie et on y rencontre une sagacité qui ne pèse ni ne pose. Le même milieu, la même «lutte des classes» sexuelle, mais dépeints avec drôlerie, avec intelligence et un total respect  des protagonistes marocains. «Poils de Cairote»  de Paul Fournel  est un titre facétieux, certes, mais un peu laid  qui ne laisse pas présager la douceur que salue ce journal tenu de novembre 2000 à juin 2003. Ainsi, le 14 avril 2002, l’écrivain, formé à l’Ouvroir  de littérature potentielle, note : «Un ami marocain débarque pour la première fois au Caire. Il m’explique que, s’il parle son marocain rauque et sec, personne ne le comprend dans ce pays de langue douce. Lui, en revanche, comprend parfaitement l’égyptien, à cause du cinéma, des feuilletons de la télé, des chansons de son enfance. -Depuis deux jours que je suis ici, précise-t-il,  j’ai l’impression de vivre dans un film- ». On n’a qu’un regret en lisant «Poils de Cairote» : Georges Henein n’est plus là pour le résumer d’un aphorisme.

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